Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/130

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Les gardes nationaux du 101e se déploient devant l’obstacle et tirent sur le colonel Vabre, le comte de Legge et l’adjudant-major Bernard, qui, à découvert près d’une des portes du palais, s’emploient à calmer les émeutiers qui peuvent les entendre…

Il est bien invraisemblable que ce bataillon déployé ait fait, presque à bout portant, un feu de salve, sur trois hommes à découvert, tous visibles et exposés, avec lesquels on parlementait, et n’en aient atteint qu’un seul. Il est plus vraisemblable de croire que l’adjudant-major, qui n’avait pas l’autorité suffisante pour parlementer avec les délégués et les chefs de bataillons, s’était tenu à distance de ses chefs, et n’a pas eu la chance, comme eux, après s’être mis à quatre pattes, de se faire ouvrir la porte de l’édifice.

Arthur Arnould, qui se trouvait parmi les manifestants, affirme que la fusillade n’a été précédée d’aucune sommation. Il ajoute :

Je déclare qu’à ce moment il n’avait pas été tiré un seul coup de fusil par les gardes nationaux, et que leurs délégués, à cet instant même, parlementaient pour obtenir d’être introduits auprès des membres du gouvernement (c’est-à-dire auprès de l’adjoint Chaudey, seul présent à l’Hôtel-de-Ville). (Arthur Arnould, loc. cit., p. 71.)

Il est évident que le commandement de faire feu n’a pas été donné par Vabre ou par Legge, puisqu’ils étaient au dehors. Ils n’avaient pas davantage convenu qu’on tirerait sur un signe ou un geste émanant d’eux. Ils eussent attendu, pour donner ce signal, d’être rentrés et abrités. On a les noms des deux officiers bretons, qui dirigèrent la fusillade : le capitaine Gourlaouen, qui commandait au premier étage, salle du Trône ou du Conseil, et le capitaine Le Stimuff, qui commandait à l’entresol. Ces deux officiers, en voyant leurs chefs discuter à travers la grille avec les