Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/177

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Aussi, apparaît-il illégal, autant que criminel, l’abus que fit par la suite cette assemblée des pouvoirs indéterminés, mais restreints en soi, et occasionnels, qui lui avaient été conférés « dans un jour de malheur ». Il n’était entré dans la pensée d’aucun électeur de la majorité campagnarde que ces mandataires, qu’on envoyait à Bordeaux expressément pour traiter de la rançon de la France, dussent, par la suite, légiférer sur toutes les matières, et surtout se mêler de donner une constitution, même républicaine, au pays. L’abus de pouvoirs fut donc indéniable, et l’usurpation de cette assemblée suffirait à justifier l’insurrection, si la province eût suivi Paris au Dix-Huit Mars.

Les républicains des « grandes villes, seuls peut-être, dans la prévision qu’ils auraient la majorité, ont voté avec l’arrière-pensée que l’Assemblée Nationale agirait comme pourvue de souveraineté, qu’elle serait constituante, législative, dictatoriale, une véritable Convention. Mais les électeurs des hobereaux et des marguilliers, qui devaient former la majorité, n’avaient pas eu de si vastes pensées, m rêvé pour leurs représentants d’aussi ambitieuses destinées. L’Assemblée Nationale convoquée et élue pour discuter de la paix ou de la guerre, après avoir pris parti pour la paix, devait se renfermer dans un rôle d’attente, dans une attitude de gouvernement provisoire, veillant à la perception des impôts dont le paiement devait servir au paiement de l’indemnité de guerre, rétablissant la police, réparant les routes, rapatriant les soldats prisonniers, hâtant la libération du territoire ; alors son mandat étant achevé, elle devait noblement et loyalement se retirer.

LA VIE BORDELAISE

La première séance de l’Assemblée Nationale eut lieu au théâtre Louit, le grand Théâtre de Bordeaux, le lundi