Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/288

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de surexciter davantage les Parisiens, pensa le chef du gouvernement. L’attribution du commandement de la garde nationale à un chef antipathique, c’était bien ; la suppression de la liberté de la presse, et la suspension de six journaux républicains, c’était mieux ; mais il fallait plus encore, pour émouvoir cette population qui semblait engourdie, qui se montrait si peu disposée à riposter à tant de provocations. Par expérience, il savait que l’irritation de la classe ouvrière ne suffisait pas à susciter une émeute, et qu’il était nécessaire d’y adjoindre le mécontentement de la classe moyenne, des petits commerçants, des employés, en se ménageant, autant que possible, les bonnes dispositions de la bourgeoisie aisée. Alors il fit proposer deux lois vexatoires, et dans des circonstances particulièrement odieuses, celle visant les loyers en retard et à courir, et celle sur les échéances des effets de commerce, billets à ordres et factures.

La loi sur les échéances constituait le plus grand péril commercial, en même temps qu’elle atteignait des particuliers, souscripteurs de petits effets à des fournisseurs, ou débiteurs de factures en retard. Elle était ainsi conçue, dans ses dispositions principales :

Les effets de commerce souscrits avant ou après la loi du 13 août 1870 (qui avait justement prorogé les échéances à raison de la guerre), venant à échéance après le 12 avril 1871 ne jouiront d’aucune prorogation, et seront exigibles. Les effets de commerce souscrits du 13 août au 12 novembre 1870 seront exigibles, avec les intérêts, date pour date, sept mois après l’échéance fixée.

Quant aux effets échus du 13 novembre 1870 au 12 avril 1871, ils devenaient exigibles, date pour date, du 13 juin au 12 juillet.

C’était la ruine et la faillite en perspective pour tous les