Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/418

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compter qu’ils tireront, si le commandement leur est donné.

Les deux gardes parlementaires essayaient de persuader les chasseurs de leurs intentions pacifiques. Le général Lecomte sent sa troupe lui échapper. Il faut toujours laisser un espace entre le peuple et les soldats, dans une manifestation, dans un rassemblement. Les cavaliers ne peuvent être approchés comme les fantassins, leur monture les isole ; aussi les emploie-t-on de préférence, pour refouler les attroupements, ils sont indispensables dans les émeutes. Lecomte n’avait que des troupes de pied, et le contact de ses hommes avec la foule devenait de minute en minute plus étroit, plus pernicieux. Le général s’était rendu au plateau supérieur, pour se rendre compte de la position de son second, le commandant Poussargues. Celui-ci n’était pas dans une meilleure posture. Il se voyait aussi environné, et, comme lui, menacé d’être débordé. Lecomte prend alors la résolution d’user de la force. Il fait faire une sommation à la foule d’avoir à se disperser, et commande de mettre en joue. La foule ne bouge pas d’abord, puis elle avance ensuite. Les femmes plus vivement implorent les soldats. Quelques-unes injurient les officiers. Le général redescend au plateau inférieur, pendant que les gardes nationaux se jettent à terre, pour laisser passer la décharge qu’ils prévoient imminente. Les femmes reculent, s’écartent en poussant de grands cris. Aucune détonation ne se produit cependant sur ce plateau. Les chasseurs n’ont pas tiré. Brusquement un coup de fusil isolé s’entend. Il ne vient pas des rangs de la troupe, ni des gardes nationaux. C’est l’homme accompagnant les deux parlementaires, qui s’est retourné, et a tiré sur les gardes nationaux derrière lui. On retrouva plus tard ce provocateur, qu’on reconnut pour être un sergent de ville déguisé en garde national. On ne sut jamais qui l’avait envoyé là, s’il était