Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/485

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Tous les rapports la confirmaient. C’était assurément un sujet d’alarme. Mais en emmenant rapidement les troupes au dehors, en supprimant tout contact avec la population, et avec le retour prochain des prisonniers d’Allemagne, soldats solides, il pourrait reprendre l’offensive, et rentrer vainqueur dans cette ville en révolte, qu’il allait se hâter d’évacuer.

Son parti était pris depuis longtemps. Quand il convoqua le conseil au ministère des Affaires Étrangères, pour délibérer sur l’évacuation de Paris, c’était affaire de pure convenance, et sa décision était arrêtée, irrévocable.

Il a reconnu, dans sa déposition devant la Commission d’Enquête, dans quelles dispositions d’esprit il se trouvait, lorsqu’il ordonna la retraite sur Versailles :

J’étais à l’état-major avec le général Vinoy, quand arriva un premier officier nous annonçant que tout allait bien. Mais plus tard, d’autres officiers nous arrivèrent fort tristes, et nous sentîmes que la situation devenait embarrassante. Ce fut alors que je fus frappé d’un souvenir, le souvenir du 24 février. J’étais depuis fort longtemps fixé sur ce point que, si nous pétions pas en force dans Paris, il ne fallait pas y rester.

Au 24 février, le roi m’avait demandé, lorsque les choses avaient pris une mauvaise tournure, ce qu’il y avait à faire. Je lui répondis qu’il fallait sortir de Paris, pour y rentrer avec le maréchal Bugeaud et cinquante mille hommes.

Le parti que je proposais au roi fut discuté, mais point accepté. On rappela que les Bourbons, que les Bonaparte eux-mêmes, étaient sortis de Paris, et n’avaient jamais pu y rentrer ; et on en avait conclu qu’il ne fallait jamais en sortir.

Ce souvenir m’était resté dans la mémoire ; et, en outre, je me rappelais l’exemple du maréchal de Windischgraetz, qui, après être sorti de Vienne, y était Reuter victorieusement quelque temps après. Je dis au général Vinoy : « Il est clair que nos troupes vont être submergées dans cette foule. Emmener les canons est impossible, les mouvements de l’armée étant aussi entravés qu’ils le sont. Tirons nous troupes du chaos où elles sont plongées