Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 1.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas et on n’administre pas, au milieu d’un combat, comme dans le calme des assemblées et des bureaux, en temps normal. Les deux mois de durée de ce régime ne fuient qu’une halte entre les batailles ; on délibéra, on statua, on administra aussi, au milieu de la fusillade, et dans l’attente d’un assaut final.

La Commune, et c’est là le plus vif grief à lui imputer, n’a rien laissé de durable. Son œuvre, non seulement fut périssable, mais matériellement, législativement nulle : elle n’a anéanti ni les lois ni les institutions du passé ; elle a laissé subsister les vieux systèmes d’impôts, les cadres sociaux, aristocratiques et privilégiés ; enfin, non seulement elle n’a pu proclamer, établir la République vraiment démocratique, mais elle n’a même pas entamé le grand œuvre de la Révolution sociale. En eut-elle le temps ? Lui en a-t-on donné la possibilité ? Question. Cette Histoire fournira la réponse.

La République actuelle, avec quarante années de paix, de prospérité et de puissance régulière et respectée, n’a même pas abordé le grand problème.

La Commune fut aussi le résultat d’une dualité antinomiste : patriote dans son origine, elle renfermait dans son sein des éléments importants et actifs d’altruisme excessif et prématuré, opposé aux sentiments égoïstes et héréditaires du patriotisme fermé. Les idées internationales passionnèrent plusieurs de ses chefs. Cette contradiction ne fut pas, en elle, un germe de mort. Avec la fin des hostilités, le calme revenu dans la cité, le travail reprenant son cours, on eût assisté à l’évolution si désirable des esprits vers l’accord européen. La paix mondiale se fût établie insensiblement, sans secousses, sans luttes nouvelles, sauf peut-être quelques expéditions coloniales et asiatiques, entreprises d’accord par toutes les nations civilisées. Le but idéal