Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 2.djvu/334

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vint immédiatement la toucher, à Versailles. Cette dame ajouta, de la part du colonel Duval, que celui-ci l’engageait vivement à ne pas rester à Paris, où l’insurrection serait certainement vaincue dès que M. Thiers aurait reçu les renforts des soldats prisonniers en Allemagne. Il l’invitait donc à venir aussitôt le rejoindre à Versailles, où on lui donnerait une situation. Lisbonne répondit à l’émissaire qu’il gardait toujours de l’amitié pour le colonel Duval, mais qu’il ne pouvait se rendre à son avis, dicté par le désir de lui être utile, et dont il le remerciait. Il préférait renoncer à l’indemnité due à son père et rester à Paris pour servir et défendre la République.

Pour ceux qui n’ont vu en Maxime Lisbonne que le chat-noires que impresario et le plaisantin de cabarets excentriques, il n’était pas inutile de rappeler qu’il fut à la fois vaillant et désintéressé.

Il avait servi dans la marine, tout jeune, puis avait obtenu un emploi au Comptoir d’escompte. Il s’était ensuite engagé dans les zouaves, et avait fait la campagne d’Italie. Mais le théâtre l’attirait. Il devint directeur d’une petite scène, les Folies-Saint-Antoine, où la guerre le trouva. Il se fit incorporer dans les bataillons de marche. Après avoir, comme on l’a vu, combattu à Bagneux et à Buzenval, nommé membre du Comité Central, il ne se présenta pas aux élections communales. Il se borna, comme colonel, à conduire au feu ses bataillons, recherchant les endroits où le danger était le plus vif. Il ne se trouvait à sa place qu’aux avant-postes. Dans la lutte désespérée des derniers jours, il fut debout jusqu’à ce qu’une balle lui ayant brisé la cuisse, à la barricade du boulevard du Temple, il se trouva hors de combat. Amputé de la jambe gauche, il fut conduit prisonnier à Versailles et condamné à mort. Sa peine fut commuée en celle des travaux forcés à perpétuité. Il fut