Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

suader de faire la paix à des belligérants qui ont surtout le désir de ne pas se battre. M. de Kératry, avec ses allures de tranche-montagrne, roulant des yeux terribles, et comme s’il fût monté à l’assaut de Puebla, prit possession de sa préfecture, que nul ne voulait lui disputer. Le soir, dans Toulouse redevenue joyeuse, les voix des ténors rassurés s’élevaient seules parmi les groupes pacifiés parcourant allègrement la cité presque en fête. De l’autre côté de la Garonne, les laborieux faubouriens déçus se retiraient, en grognant, regagnaient tristement leurs maisons, et soupaient hâtivement. On se mit au lit de bonne heure à Saint-Cyprien, ce soir-là, car la journée avait été énervante, et il fallait être dispos pour empoigner les outils, comme à l’ordinaire, le matin venu.

Ainsi finit la Commune, ou l’ombre de Commune, qu’entrevit un instant la Reine du Midi, plus que jamais redevenue la capitale des Jeux Floraux, la ville artiste et savante de Clémence Isaure, des juristes et des troubadours.

§ III. — La Commune à Saint-Étienne

LE PAYS NOIR

Saint-Étienne, la cité noire et fumeuse, semble une ville manufacturière d’Angleterre transportée dans ce Forez, qui, avant l’invasion industrielle, était chanté par les poètes et les romanciers comme la riante contrée des pastorales galantes. Le rose pays du Tendre a perdu ses bergères enrubannées, et les couples fleuris ne vont plus, échangeant de poétiques colloques, sur les bords pimpants du Lignon. Le pays de l’Astrée est devenu la région de la houille et des