Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/18

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pas là le désir, le calcul de M. Thiers, la suite de l’exécution de son plan détestable ?

Les pourparlers, afin d’arriver à cette convocation, avaient été longs et difficiles. À la fin on avait cédé, transigé, et la convocation avait été décidée. Sa régularité n’était contestable alors pour personne, à Paris du moins. On était de bonne foi au Comité Central, et ceux des maires qui n’étaient pas dans le secret des fourberies de M. Thiers croyaient ingénument avoir capacité de traiter. Ils pensaient agir en pleine légalité. Les honnêtes gens qui mirent leur signature au bas de l’accord, et qui appelèrent aux urnes les citoyens, ne pouvaient supposer que cet accord était une frime. Il leur était impossible de croire qu’ils signaient, après tant d’hésitations et de formules débattues, un papier nul. Personne ne vint de Versailles les avertir, même officieusement, qu’ils convoquaient en pure perte, et que la convention qu’ils avaient signée était un acte illégal autant qu’inutile. On ne prévint pas davantage les électeurs que, s’ils répondaient à cet appel sans valeur, ils se dérangeraient inutilement, et nommeraient une assemblée dépourvue d’existence légale.

Les parisiens avaient été au scrutin avec sincérité, avec espoir. Il y avait deux camps en présence, numériquement inégaux, il est vrai, mais dans chacun on avait admis de s’en rapporter au vote. On espérait que de l’urne sortirait la paix, un régime acceptable et durable pour Paris. Nul n’avait le moindre doute sur la légitimité du vote qu’on allait émettre. Si le gouvernement n’avait pas directement convoqué les électeurs, il avait certainement connu la convocation et il ne s’y était pas opposé. Adhésion tacite peut-être, mais non ignorance. M. Thiers, s’adressant à M. Tirard, avait parlé de la transaction en cours ; sans l’approuver franchement, ouvertement, il ne s’était pas opposé à la