Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/232

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à l’imminent péril du Mont-Valérien s’il tombait au pouvoir de Versailles. Tous ceux qui ont laissé libre la clef de Paris doivent encourir avec Bergeret le blâme impitoyable et la sanglante responsabilité.

ÉMILE EUDES

Eudes aussi était un fils de la bourgeoisie. Bachelier, étudiant en pharmacie, puis gérant de vaillants petits journaux du quartier latin sous l’empire, comme la Libre pensée, Émile-François Eudes, né à Roncey (Manche), en 1844, fut tout à coup en vue, au mois d’août 1870, après nos premiers désastres. Blanquiste ardent, il suivit son chef à la fameuse attaque du poste de la Villette.

Traduit devant le conseil de guerre, il se défendit contre l’accusation absurde du parquet d’avoir, par sa tentative, servi l’ennemi.

Je proteste, s’écria-t-il avec véhémence, contre la pensée d’avoir voulu favoriser les desseins de la Prusse. J’ai voulu repousser l’invasion, et, pour cela, renverser d’abord l’empire. J’ai cru que le salut était là. Je proteste également contre toute idée d’avoir voulu commettre un meurtre individuel. Les traitres à la patrie et les assassins ne sont pas parmi les républicains. C’est une infâme calomnie que de prétendre que j’étais de connivence avec les prussiens. Je mets quiconque au défi de prouver rien de semblable. Si c’est ma tête que vous voulez, prenez-la, mais ne me déshonorez pas. J’ai agi avec toute mon ardeur de patriote, pour la France et pour la République…

Cette énergique et louable défense n’empêcha pas le conseil de guerre de condamner à mort Eudes, avec Bridau, également ami de Blanqui. Mais l’empire n’avait plus que quelques heures d’existence ; ses derniers défenseurs, apeurés et tremblant devant les responsabilités, n’osèrent pas réclamer l’exécution de ces deux vaillants jeunes gens. Ils