Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/236

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choisis avec soin parmi les plus déterminés et les plus aguerris, auraient dû exclusivement composer cette grande avant-garde. On a vu qu’elle s’était formée d’elle-même, comme un rassemblement populaire, et les éléments les plus divers s’y rencontraient confondus. Cette bande désordonnée allait droit devant soi, sans méfiance comme sans précautions. Elle avait commencé à gravir les pentes du premier plateau et dépassé le Mont-Valérien, dont on apercevait d’en bas la silhouette massive se détachant sombre sur la cime de la colline et dominant toute la campagne, quand, tout à coup, un éclair brilla, puis le fracas du canon ébranla l’air, en même temps que des flocons de fumée s’enroulaient au-dessus des bâtiments de la forteresse. Le Mont-Valérien trait ! La surprise accompagna l’épouvante et l’on crut à une trahison. L’intervention du fort était cependant logique, et l’on devait s’y attendre. Ce qui augmenta la stupeur, c’est qu’avant de lancer ses obus le commandant de la forteresse avait laissé passer le plus gros de la colonne, et ses projectiles prenaient en queue la majeure portion des assaillants. La canonnade ne commença que lorsque la voiture de Bergeret fut à la hauteur de l’entrée du fort. Ce fut alors que les deux chevaux du général furent tués. Bergeret s’efforça vainement de rallier ses hommes en débandade, il dut renoncer à canonner le fort et à tenter l’assaut, comme il en eut l’intention. La colonne qui avait essuyé le feu du Mont-Valérien avait été divisée, en arrivant au rond-point de la Boule à Nanterre, sur la route nationale, la partie qui prit sur la gauche et monta vers la forteresse avait été seule atteinte par les obus. Ces hommes se dispersèrent en désordre battant en retraite et refluèrent vers le pont de Neuilly. La seconde portion de la colonne, qui avait suivi la route, continua à s’avancer vers la Malmaison et Bougival.