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PAN



À Otto Julius Bierbaum,
E. de C.


Les mille dards de Phœbus déclinent déjà sans force… Par le feuillu Cyllène, les prudentes Oréades, riantes et nues, avec des peurs de biches, fuient pressées par les Ægipans, dont les flûtes sonnent.

Plongeant et replongeant, fiévreuses, leurs beaux corps blancs, dans la smaragdine mer des arbrisseaux touffus, elles courent, crient, s’exhalent en soupirs, bondissent par-dessus les ravins, leurs tresses d’or flottant aux Zéphyrs espiègles.

La lumière va mourant… L’air semble de duvet… L’aboi des sagaces meutes de Diane s’entend lointain, le chant des rossignols et, par les pâturages, le meuglement des taureaux fauves poursuivant les génisses rapides.

Mille luxures, mille philtres flatteurs voguent par l’éther, éveillent et suggèrent des délices ; il s’échappe des soupirs d’amour ; et les bras des lauriers sont des bras féminins, souffrant d’un désir de caresses.

Mais voici qu’à l’appel de Pan qui les réclame, les prompts Satyres soudain s’arrêtent, laissent les traces musicales des Oréades légères, et déjà, troupe tumultueuse, courent à la recherche du dieu.

Il attend appuyé, le dieu, sur un hêtre gisant à terre ; à son dos pend ensanglantée la peau d’un lynx ; il appuie, dans l’une de ses mains, son front tout triste ; et de l’autre, il retient la flûte énamourée.

— « Étourdis ! » s’écrie Pan, voyant les Ægipans, « malgré ce lit moelleux de safran parfumé, de fraîches roses, que j’avais trouvé, je n’ai pu m’endormir, tant vous faisiez du bruit.