Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/104

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il y avait à peine dix minutes écoulées que celui que nous attendions parut à l’extrémité de la place. Il était avec le colonel N… qui l’accompagna jusqu’à l’hôtel, prit congé de lui et retourna à la forteresse.

J’envoyai aussitôt un invalide à Maxime.

Le laquais alla à la rencontre de Petchorin, lui dit qu’on allait atteler tout de suite, lui donna son porte-cigare, prit ses ordres et partit pour les exécuter. Son maître tira un cigare, bailla deux fois et s’assit sur le banc placé de l’autre côté de la porte.

Maintenant, je dois vous faire son portrait.

Il était de stature moyenne et bien proportionné ; sa taille svelte et ses larges épaules annonçaient une forte constitution qui, en lui permettant de supporter les fatigues d’une existence nomade et les changements de climat, avait rendu sa santé inaltérable, malgré les excès d’une vie déréglée dans la capitale et les orages de son âme. Son pardessus de velours, couvert de poussière et retenu par les deux boutons inférieurs, laissait voir un linge éblouissant de blancheur, qui dénotait un homme comme il faut ; ses gants, quoique sales, disaient qu’ils avaient été faits