Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/185

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n’aime guère les femmes à caractère fort ; est-ce là leur affaire ?

En vérité, je me souviens maintenant que je n’ai aimé qu’une fois, une seule fois, une femme à la volonté ferme, et que jamais je ne pus dompter. Nous nous quittâmes brouillés et peut-être que si je l’avais rencontrée cinq ans plus tard, nous nous serions séparés autrement.

Viéra est malade, très malade, quoiqu’elle ne l’avoue pas. Je crains qu’elle ne soit phtisique ou qu’elle ne soit atteinte de ce mal qu’on appelle une fièvre lente, maladie qui n’est pas russe le moins du monde et qui n’a pas de nom dans notre langue.

L’orage nous a arrêtés dans la grotte et retenus une demi-heure de plus. Elle ne m’a point contraint à lui faire des serments éternels et ne m’a pas demandé si j’avais aimé d’autres femmes depuis le jour où nous nous étions séparés. Elle s’est confiée à moi de nouveau avec son insouciance d’autrefois et je ne la tromperai pas. C’est la seule femme dans le monde que je n’aurai jamais songé à tromper. Je sais que nous nous séparerons bientôt de nouveau, et peut-être pour l’éternité. Nous allons tous deux