Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/240

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fenêtre et je braque ma lorgnette sur son balcon : Elle est déjà habillée et attend le signal dont nous sommes convenus. Nous nous rencontrons, comme par hasard, dans le jardin qui descend de nos demeures au puits. L’air vif des montagnes a rendu à son visage sa fraîcheur et lui a redonné des forces. Ce n’est pas à tort que Narian[1] s’appelle la source aux eaux héroïques. Les gens du lieu affirment que l’air de Kislovodsk dispose à l’amour et qu’ici se dénouent tous les romans commencés au pied du Machuk. Et effectivement tout respire ici la solitude ; — ici tout est mystérieux, et les ombres épaisses des allées de tilleuls penchés sur la rivière qui gronde avec fracas et qui, bondissant de rocher en rocher, se creuse un lit au milieu des verdoyantes collines ; et les défilés pleins de vapeurs et de silence dont les replis courent dans toutes les directions ; et la fraîcheur de l’air parfumé par les suaves émanations des hautes et jeunes herbes et des blancs acacias ; et le murmure monotone et doucement endormant des ruisseaux à l’onde glacée qui se rencontrent au pied

  1. Nom d’une source minérale.