Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/52

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dans son voile, ne parle pas et ne regarde personne ; elle est timide comme une biche des forêts ; je lui ai donné une compagne qui sait le tartare, qui la soignera et l’habituera à cette pensée qu’elle est à moi ; car elle ne sera jamais à personne qu’à moi ! ajouta-t-il en frappant du poing sur la table.

Je consentis à tout cela ; que vouliez-vous que je fisse ? Il est des hommes avec lesquels il faut toujours être de leur avis.

— Mais qu’arriva-t-il ? demandai-je à Maxime ; est-ce que réellement il l’habitua à lui, ou bien se mit-elle à languir et à regretter les siens ?

— Eh ! de grâce, quel chagrin vouliez-vous que lui procurât la privation de sa famille ? On voyait aussi bien les montagnes de la forteresse que de son village. Et il ne faut pas autre chose à ces sauvages.

Pourtant, chaque jour, Grégoire lui offrait un présent ; pendant quelque temps elle se tut et refusa fièrement ceux que lui présentait sa compagne afin d’exciter son babil. Ah ! des présents !… que ne fait cependant une femme, pour un chiffon de couleur ? Mais laissons cela de côté… Grégoire se donna beaucoup de peine