Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/82

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— Ah ! répondit-il, c’est vrai ; ils ont toujours été de grands ivrognes ! »

Je me souvins involontairement d’une grande dame de Moscou qui assurait que Byron n’était rien de plus qu’un ivrogne. Or, la remarque du capitaine était excusable, car depuis qu’il s’abstenait de boire, il s’efforçait de se persuader que dans le monde tous les malheurs provenaient de l’ivrognerie.

Après cette digression, il continua son récit de la sorte :

« Kazbitch ne reparut plus. Mais je ne sais pourquoi je ne pouvais chasser cette idée de ma tête, qu’il n’était pas venu pour rien et qu’il tramait probablement quelque affreux projet.

Un jour Petchorin me pria de l’accompagner à la chasse au sanglier. Je refusai longtemps ; que pouvait avoir de rare pour moi la vue d’un sanglier ? Il parvint cependant une fois à m’entraîner avec lui ; nous prîmes cinq soldats et partîmes de bon matin. Jusqu’à dix heures nous fouillâmes en tous sens les roseaux et le bois ; pas de bêtes ! Retournons, lui dis-je, et ne nous entêtons pas ; il est évident que nous avons choisi un mauvais jour !