Page:Leroux - Le Fauteuil hanté, Lafitte, 1900.djvu/78

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signe, mauvais signe !… Monsieur le Perpétuel, ma grand-tante me le disait toujours… « Babette, méfie-toi des vielleux !… » Et ma grand-tante, qui avait atteint un grand âge, Monsieur le Perpétuel, s’y connaissait pour ça… Elle habitait juste en face de La Bancal, dans mon pays natal, à Rodez, la nuit qu’ils ont assassiné le Fualdès… et elle a entendu l’air du crime… l’air que les joueux d’orgue et les vielleux « tournaient » dans la rue, pendant que sur la table, La Bancal et Bastide et les autres coupaient la gorge au pauvre homme… C’était un air… qui lui est toujours resté dans les oreilles… à la pauvre vieille, et qu’elle m’a chanté autrefois, en grand secret, tout bas, pour ne compromettre personne… un air… un air…

Et la Babette s’était soudain dressée avec des gestes d’automate… Son visage, éclairé par la lueur rouge et pâlotte du réverbère d’en face, exprimait la plus indicible terreur… Son bras tendu montrait la rue d’où une ritournelle lente, lointaine, désespérément mélancolique venait.

— Cet air-là !… râla-t-elle. Tenez… c’était cet air-là !