Page:Leroux - Mister Flow.djvu/228

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près de se consoler. Quant à son porte-monnaie, ma conscience me laisse en repos, puisque j’ai décidé de rembourser Trompette à la première occasion. Je ne saurais trop recommander ce dictame (la bonne intention) aux âmes pusillanimes, qui hésitent sur un acte nécessaire, sous prétexte que leur meilleur ami aurait à en souffrir.

Non ! Si je n’ai pas écrit à Helena, c’est que j’ai honte de me montrer dans l’état où je suis.

À propos, la pension de cent cinquante francs que m’octroie la charité d’un vieux parent ne m’a pas été versée ce mois-ci. Elle a dû lui être retournée, puisque je suis parti en vacances sans laisser d’adresse. C’est à lui que je vais écrire.

Trois jours plus tard, je reçus une lettre chargée payable à domicile. J’ai donné mon vrai nom à l’auberge. Ma signature sur le registre du facteur est le premier acte qui me rend à mon véritable état civil.

Ma barbe a encore poussé. J’ai maintenant un soyeux collier sur les joues et autour du menton, qui me donne un petit air 1830, qui me sied à ravir. « C’est lui, c’est don Carlos, c’est toi mon bien-aimé ! » Master Prim a disparu pour toujours. Du moins, je l’espère.

J’ai acheté un pantalon de treillis et une vareuse. Je suis sortable. Je vais me promener à Luc. Je ne redoute plus de rencontrer un collègue. Je remonte de Luc à Lion-sur-Mer. Ce nom me fait souvenir tout à coup que mes deux voisines de la rue des Bernardins ont « leur villa » non loin d’ici,