Page:Leroux - Mister Flow.djvu/45

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je grogne. Je dois avoir une figure redoutable : on n’insiste pas.

Un luxueux appartement, au rez-de-chaussée ; grandes portes-fenêtres ouvertes sur les parterres fleuris. Du reste, des fleurs, il y en a partout. Ce salon en est plein et des plus rares, des orchidées à faire rougir un singe ! Une femme de chambre des plus coquette me fait entrer dans un boudoir. Nom d’un rat ! Lady Helena doit laisser quelque chose derrière elle comme « sillage embaumé » !…

Les parfums, surtout les moins timides, ceux qui avouent audacieusement leur dessein de viol, m’ont toujours bouleversé. Je ne sais déjà plus ce que je fais là, ni surtout ce que je vais faire… Un rôle pareil, c’est au-dessus de mes moyens… Je vais me trahir tout de suite… Elle est jolie, lady Helena ! très jolie !… J’ai vu son portrait dans la collection Durin… Six j’avais été moins bassement inquiet, je me serais certainement attardé à la contemplation de certains détails… Je me rappelle, par exemple, que ses seins, ses seins nus… car il y avait des photos d’une intimité… Je sens que, lorsqu’elle va être là, je vais bégayer, que mes gestes vont être ridicules ou odieux… Est-ce que je sais, moi, comment on parle à une lady !… à une lady qui couche avec son domestique !… On peut se croire tout permis, et alors !… alors ce que l’on peut se faire remettre à sa place !… Ça doit se donner comme une reine, une femme comme ça !… ou vous chasser comme une impératrice !… On n’a plus qu’à s’en aller à quatre pattes !… Si je fuyais, tout simplement ?