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Page:Les œuvres libres - volume 1, 1921.djvu/139

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point encore relevée de ses couches. Il salua cette jeune fille de maison distinguée, de réputation intacte, par quelques mots de courtoisie familière, amicale — puis n’y pensa plus.

— …Eutychia, disait Fulvia quelques instants plus tard, écoute ! Ma mère ne savait pas toute la vérité, quand tu l’interrogeas, ou plutôt sans doute la voulait-elle dissimuler : les poursuites sont décidées ; elle-même y a poussé. Tu la connais, il s’y fallait attendre. Demain, peut-être aujourd’hui, elles vont commencer. Il faut prévenir tes amis, le plus vite que tu pourras. Dis à Onésime et à tous les « anciens » consacrés par l’évêque, qu’ils s’éloignent. Il y a de bonnes retraites aux alentours du lac Stymphale ; on n’ira pas les y chercher, peut-être ne le désire-t-on point. Dis-leur aussi qu’on va faire l’inventaire des Ecclesiæ, qu’ils emportent avec eux ou qu’ils cachent les livres et les choses des mystères. Vite ! Vite ! Toi-même tu seras soupçonnée… J’espère que Vélléius oubliera de lire ton nom sur les listes dressées par les stationnaires — si ce nom s’y trouve, comme je le pense — car c’est le métier de ces gens d’inscrire tous ceux qu’on leur signale, et ils laissent à de plus élevés le soin de décider. Pérégrinus sait l’affection qui nous lie, mais s’il lui arrive ensuite une dénonciation publique, en pleine agora ? Cela se voit ; il serait obligé d’agir, ou d’en avoir l’air… Prie ton père de te conduire dans votre villa de Phaistos : on n’ira pas t’y demander.

— Mais toi ?

— Moi ?… Je suis la fille de Pérégrinus : qui oserait me soupçonner ? D’ailleurs, en vérité, je ne suis pas chrétienne. On me demanderait de brûler un boisseau d’encens sur l’autel des Olympiens que je n’y verrais nul inconvénient ; je ne conçois pas, du reste, que vous vous refusiez à un geste de si peu d’importance… J’ai des sym-