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CONTES ARABES.

lui présenta. Elle le prit ; et après avoir mis quelque temps à l’accorder, elle commença à le toucher ; et l’accompagnant de sa voix, elle chanta une chanson sur les tourmens de l’absence, avec tant d’agrément, que le calife et tous les autres en furent charmés. Lorsqu’elle eut achevé, comme elle avoit chanté avec beaucoup de passion et d’action en même temps : « Tenez, ma sœur, dit-elle à l’agréable Amine, je n’en puis plus, et la voix me manque ; obligez la compagnie en jouant et en chantant à ma place. » « Très-volontiers, répondit Amine, en s’approchant de Safie, qui lui remit le luth entre les mains, et lui céda sa place. »

Amine, ayant un peu préludé, pour voir si l’instrument étoit d’accord, joua et chanta presque aussi long-temps sur le même sujet, mais avec tant de véhémence, et elle étoit si touchée, ou, pour mieux dire, si pénétrée du sens des paroles qu’elle chantoit, que les forces lui manquèrent en achevant.