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CONTES ARABES.

ce qui nous surprit davantage, nous remarquâmes qu’il n’avoit que quatre doigts et point de pouce ; et personne jusque-là ne s’en étoit encore aperçu, quoiqu’il eût déjà mangé d’autres mets. Le maître de la maison prit aussitôt la parole : « Vous n’avez point de pouce, lui dit-il ; par quel accident l’avez-vous perdu ? Il faut que ce soit à quelque occasion dont vous ferez plaisir à la compagnie de l’entretenir. » « Seigneur, répondit-il, ce n’est pas seulement à la main droite que je n’ai point de pouce, je n’en ai point non plus à la gauche. » En même temps il avança la main gauche, et nous fit voir que ce qu’il nous disoit étoit véritable. « Ce n’est pas tout encore, ajouta-t-il : le pouce me manque de même à l’un et à l’autre pied ; et vous pouvez m’en croire. Je suis estropié de cette manière par une aventure inouie que je ne refuse pas de vous raconter, si vous voulez bien avoir la patience de l’entendre : elle ne vous causera pas moins d’étonnement qu’elle vous