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Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, III.djvu/113

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CONTES ARABES.

» Le calife ne put s’empêcher de rire de mon aventure ; et tout au contraire de ce jeune boiteux qui me traite de babillard, il admira ma discrétion et ma contenance à garder le silence. « Commandeur des croyans, lui dis-je, que votre Majesté ne s’étonne pas si je me suis tu dans une occasion qui auroit excité la démangeaison de parler à un autre. Je fais une profession particulière de me taire ; et c’est par cette vertu que je me suis acquis le titre glorieux de silencieux. C’est ainsi qu’on m’appelle pour me distinguer de six frères que j’eus. C’est le fruit que j’ai tiré de ma philosophie ; enfin cette vertu fait toute ma gloire et mon bonheur. » « J’ai bien de la joie, me dit le calife en souriant, qu’on vous ait donné un titre dont vous faites un si bel usage. Mais apprenez-moi quelle sorte de gens étoient vos frères : vous ressembloient-ils ? » « En aucune manière, lui repartis-je ; ils étoient tous plus babillards les uns que les autres ; et quant à la figure, il y avoit encore