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CONTES ARABES.

Le calife étoit un jour dans cette situation d’esprit, quand Giafar, son grand visir, fidèle et aimé, vint se présenter devant lui. Ce ministre le trouva seul, ce qui lui arrivoit rarement ; et comme il s’aperçut en s’avançant, qu’il étoit enseveli dans une humeur sombre, et même qu’il ne levoit pas les yeux pour le regarder, il s’arrêta en attendant qu’il daignât les jeter sur lui.

Le calife enfin leva les yeux, et regarda Giafar ; mais il les détourna aussitôt, en demeurant dans la même posture, aussi immobile qu’auparavant.

Comme le grand-visir ne remarqua rien de fâcheux dans les yeux du calife qui le regardât personnellement, il prit la parole. « Commandeur des croyans, dit-il, votre Majesté me permet-elle de lui demander d’où peut venir la mélancolie qu’elle fait paroître, et dont il m’a toujours paru qu’elle étoit si peu susceptible ? »

« Il est vrai, visir, répondit le calife en changeant de situation, que