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CONTES ARABES.

son maître, et tu ne portes pas de fruits, comment en porterois-tu si tu étois planté ailleurs ? » Tu es encore jeune, Nadan ; mais la vieillesse de l’aigle vaut mieux que la jeunesse du corbeau. Tu parles de pardon ; mais je n’ai demandé que tu fusses remis entre mes mains que pour te soustraire à la vengeance des lois et aux plus cruels supplices. Si je pouvois te rendre la liberté, bientôt Sencharib, accusant ma foiblesse, te livreroit au glaive de la justice. Je ne veux pas user de mes droits envers toi : Dieu jugera entre nous d’eux, et te récompensera un jour selon tes actions. »

Nadan, accablé de ces reproches, et livré à ses remords, ne jouit pas long-temps de la vie qu’il devoit à la bonté d’Hicar. Il fut suffoqué par sa propre rage ; et sa fin misérable confirma la vérité de cette sentence : « Celui qui creuse une fosse à son frère y tombe lui-même ; et celui qui tend un piège à un autre y est pris le premier. »