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LE HANNETON

que l’insecte parfait ne vit lui-même sur les arbres que de dix à quinze jours. C’est ici que les affaires se compliquent et que le procès prend une terrible tournure pour le hanneton. Cette larve est vulgairement connue sous les noms de ver blanc, de man, de turc. Que voyez-vous là ? Un gros ver pansu, de démarche lourde, courbé sur lui-même, de couleur blanche avec la tête jaunâtre. Regardez encore : le gros ver a six pattes qui lui servent, non à courir à la surface du sol, mais à ramper sous terre ; des mandibules fortes, aptes à trancher les racines des plantes. Sa tête, afin de fouiller avec plus de vigueur, a pour crâne une calotte de corne. Regardez toujours. Le ventre est distendu par la nourriture, qui apparaît en teinte noire à travers la peau de la bedaine, tant et tant que le ver ne peut se tenir sur ses jambes et se couche paresseusement sur le flanc. Cette larve vit trois ans, toujours sous terre, creusant d’ici et de là des galeries à la manière des taupes et vivant de racines. Tout lui est bon : racines des herbes et des arbres, des céréales et des fourrages, des plantes potagères et des végétaux d’ornement. L’hiver, elle s’enfonce profondément en terre et s’engourdit ; au printemps, elle remonte dans les couches supérieures, s’installe aux racines et passe d’une plante à l’autre à mesure que le mal est fait. Vous avez dans le jardin un beau carré de laitues ; sans motif apparent, un jour tout se flétrit. Vous tirez à vous ; le plant fané vient sans racine, le ver blanc l’a tranchée. Vous avez une pépinière d’arbustes que vous choyez comme vos yeux. L’affreux ver passe par là : la pépinière n’est plus bonne qu’à