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LES RAVAGEURS

Louis. — La piqûre de la guêpe est bien plus mauvaise. En vendangeant, l’an dernier, je saisis une grappe où se trouvaient des guêpes. J’eus la main enflée tout le jour, avec des douleurs qui m’auraient fait pleurer s’il n’y avait eu personne.

Jules. — Est-il possible que d’aussi petites bêtes vous fassent tant de mal ! Je voudrais bien savoir pourquoi.

Paul. — Je vais vous le dire. L’aiguillon ou dard de ces insectes est une menue lance dure et très pointue, une espèce de poignard plus fin que la fine aiguille. Il est placé au bout du ventre. À l’état de repos, il ne se voit pas, caché qu’il est dans une gaine rentrant dans le corps de la bête ; au moment du danger, il sort de son étui. Or ce n’est pas précisément la blessure faite par l’aiguillon qui provoque la cuisante douleur que vous savez. Elle est si légère, cette blessure, si subtile, que nous ne pouvons la voir. À peine la ressentirions-nous si elle était faite par une aiguille ou par une épine aussi menue que le dard. Mais l’aiguillon est en communication avec une poche à venin logée dans le corps de l’insecte, et, au moyen d’une rigole dont il est creusé, il conduit au fond de la blessure une gouttelette du redoutable liquide. L’aiguillon est alors retiré : quant au venin, il reste dans la blessure, et c’est lui, uniquement lui, qui est cause de la douleur.

Les savants qui se sont occupés de cette curieuse question nous parlent de l’expérience suivante, pour établir que c’est bien le liquide venimeux introduit dans la blessure, et non la blessure elle-même, qui endolorit le point piqué. Quand on se pique légère-