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QUATORZIÈME AVENTURE.

voulions. Où sont-elles ? allons-y, mais n’y a-t-il pas danger ? — Non : elles sont gardées par un seul paysan. — Cela suffit, » dit Primaut, « et j’y cours. Je veux en rapporter une ou deux, et cette fois nous les mangerons ensemble. — Bon voyage donc ! sire compain ; » et Renart demeure, en espérant que son cher ami va courir à de nouvelles mésaventures.

En effet, Primaut arrive au milieu de la bande d’oies, et d’abord tout lui réussit. Il jette son dévolu sur la plus grasse, fond sur elle et déjà la ramenoit, quand le pâtre retournant du bois l’aperçoit et lance sur lui les deux mâtins qui l’accompagnent. Le chemin lui étant ainsi fermé, Primaut se résigne à lâcher sa proie, non sans avoir reçu de légères atteintes de la dent canine. Il revint à Renart plus vite qu’il n’étoit parti, mais cette fois de fort mauvaise humeur.

« Par le corbleu ! Renart, » dit-il en arrivant, « voilà trop longtemps que tu me honnis et me gabes. Tu n’avois rien à attendre de ma mort, mais tu pourras bien te repentir de l’avoir voulu préparer. Ah ! je le vois maintenant : quand tu me faisois sonner les cloches, c’étoit pour appeler le prouvère ; quand tu m’envoyois aux marchands de harengs, c’étoit pour me faire assommer ; quand