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RENART CHEZ DAME HERSENT.

fait pas un geste ; sans doute il comptoit sur l’obscurité de la salle pour donner le change à la dame. Hersent l’appelle une seconde fois par son nom et lui fait même du petit doigt signe d’approcher. « J’aurois bien des reproches à vous adresser, damp Renart ; mais je vois que vous ne voulez rien faire pour m’être agréable. En vérité, jamais on n’a traité sa commère aussi mal que vous faites. » Ces paroles dites d’un ton carressant rendirent confiance à Renart. « Madame, » dit-il, « j’en prends Dieu à témoin, ce n’est pas de mon gré que j’ai cru devoir éviter de vous rendre visite pendant vos couches ; bien au contraire : mais Ysengrin, vous le savez, me cherche noise et m’épie constamment par monts et par vaux ; pourquoi m’a-t-il ainsi pris en haine, je l’ignore, ne luy en ayant jamais donné la moindre occasion. Ne prétend-il pas que je vous aime et que je cherche à prendre sa place ici ? Il n’est pas un de vos voisins qui ne lui ait entendu raconter que vous aviez de l’amour pour moi, et qu’il s’en vengerait un jour ou l’autre. Et pourtant, vous savez si je vous ai jamais dit un seul mot qui ne fût pas convenable. À quoi pourroit-il servir de prier d’amour une grande dame qui ne manquerait pas d’en rire à nos dépens ? »

Ces paroles, Hersent les écoute avec une co-