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VINGT-QUATRIÈME AVENTURE.

voit couvert de feuillage, afin de mieux le tenir au frais. Près de là étoit la hart dont le vilain l’avoit attaché pour le porter plus aisément.

« Sire Ysengrin, » dit Renart, « vous allez me donner, j’espère, la part qui me revient dans le bacon ? — Ami, tu veux rire, » reprend le loup, « assurément tu dois te trouver fort heureux d’avoir échappé à mon ressentiment. Cependant, je te permets de prendre la hart, fais-en ce qu’il te plaira ; mais ne demande rien de plus. »

Renart comprit qu’avec un compagnon de la force d’Ysengrin, il n’y avoit pas à réclamer. « Si quelqu’un, » dit-il, « mérite la hart, ce n’est assurément pas moi. Je le vois, on n’a pas grand profit à attendre de votre compagnie, permettez-moi de prendre congé. D’ailleurs, j’ai la conscience chargée de quelques gros péchés, et mon intention seroit, pour en avoir l’absolution, d’aller en pelerinage à Saint-Jacques. — Soit, » dit Ysengrin, je ne te retiens pas ; je te recommande à Dieu. — Et vous au diable ! » repartit à demi-voix Renart : « au moins n’est-ce pas ma prière qui vous en délivrera. »