Page:Les filles de Loth et autres poèmes érotiques, 1933.djvu/150

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Tel l’escadron dont Rome allait être la proie,
Terrassé par le punch et les filles de joie,
Au lieu d’aller sur Rome et d’y mettre la main,
Haletant, s’arrêta pour dormir en chemin ;
Tels les cent morpions qui labouraient mes couilles
S’endormirent un jour dans un fatal repos.
Ils digéraient gaîment leurs opimes dépouilles ;
Leurs abdomens faisaient concurrence aux citrouilles…
Mais nous allons chanter comme ils furent capots.

Sous le taudis meublé qu’occupaient mes pénates
Habitait d’Esculape un disciple en renom,
Fabricant breveté de sirops et de pâtes,
Un potard, puisqu’il faut l’appeler par son nom.
Jamais je n’absorbais un gramme de guimauve
Sans prendre les conseils du savant pour appui.
Et, pour tout ce qui touche à mes secrets d’alcôve,
Jamais un confesseur n’en sut autant que lui.
Bien que, depuis longtemps les hasards de ma vie
M’aient fait porter ma tente en une autre patrie,
J’ai gardé, malgré tout, dans le fond de mon cœur,
Le vivant souvenir de ce défunt docteur.
Parfois même, en fouillant mes vieilles redingotes,
Je retrouve aujourd’hui des lambeaux de ses notes.
Ici, trois francs cinquante, un pot de copahu ;
Là, vingt sous (grand rabais), suspensoir élastique ;
Trois sous d’eau blanche ; un franc de vin aromatique ;
Et je songe en pleurant à cet ami perdu.
Quand j’eus frotté mes yeux et passé ma culotte,
J’allais trouver notre homme et lui dis, en deux mots,
Qu’un infernal troupeau de nombreux asticots
À mes frais, jour et nuit, sur moi faisaient ribote.


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