Page:Les filles de Loth et autres poèmes érotiques, 1933.djvu/152

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« Il eut été plaisant de voir ces pauvres filles
« D’heure en heure enfiler un monstre à coups d’aiguille
« Et s’aller confesser ensuite à leur pasteur
« Du mal, dont le Malin, peut-être, était l’auteur.

« Vous savez, à présent le mal qui vous dévore.
« Avez-vous eu la gale, ami ? C’est pis encore.
« Jugez donc, mon enfant, du mal qui vous désole
« Craignez les morpions autant que la vérole.
« Et si chacun de nous ne veille sur sa peau
« Le monde entier sera rongé par le fléau.
« Le monstre a pénétré déjà chez les sauvages.
« À Quimper-Corentin, il étend ses ravages.
« Le coupé de Vénus, en place de pigeons,
« Sera bientôt traîné par trois cents morpions…
« Mais je veux au fléau me livrer en pâture
« Si demain, vous sentez encore une piqûre.
« Tuez ! voici la mort ! la victoire est à vous ! »

Je partais : — « Eh ! dit-il, vous me devez deux sous ! »
Pour deux sous vous aurez des journaux de portière,
Les canons de Suresnes et des mêlé-cassis ;
Vous pourrez rendre heureux des titis de barrière
Qui vous appelleront prince, duc ou marquis.
Mais ce sont là régals de gent millionnaire,
Et, s’il faut vous donner un conseil, mes amis,
Quand vous aurez deux sous, à ne savoir qu’en faire,
Dans la prévision d’un accident vulgaire,
Prenez chez un potard, pour deux sous d’onguent gris.
J’ai longtemps fréquenté des caboulots infâmes ;
J’ai souvent trébuché le soir sur les pavés ;
J’ai donné bêtement ma jeunesse à des femmes
Qui me faisaient porter ma montre où vous savez ;


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