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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/262

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de bons peintres dans ce royaume. On n’eut pas grand’peine à le persuader de quitter sa patrie, parce que, depuis la sédition des Ciompi[1] et depuis que Michele di Lando fut fait gonfalonier, ses jours étaient continuellement menacés, car il avait échangé quelques mauvais propos avec quelques-uns de ses concitoyens. Étant donc passé en Espagne[2], et travaillant pour le roi, il amassa de grandes richesses qu’il désira ensuite montrer à ses parents et à ses amis ; revenant donc à Florence en meilleur état qu’il en était parti, il fut favorablement reçu par tous ses concitoyens. Il ne se passa pas beaucoup de temps qu’on le chargeât de peindre l’histoire de saint Jérôme, dans la chapelle consacrée à ce saint, dans l’église du Carmine[3]. Cet ouvrage, remarquable par la variété des figures et des costumes, semblables à ceux que portaient les Espagnols d’alors, valut une grande réputation à Stamina auprès des artistes, de même que ses bonnes manières et la douceur de son caractère, en sorte que son nom devint fameux en Toscane et dans toute l’Italie.

Appelé à Pise pour y peindre le chapitre de San Niccola, il envoya à sa place Antonio Vite da Pistoia, pour ne pas quitter Florence. Celui-ci représenta à la satisfaction des Pisans, l’an 1403, la Passion de Jésus-Christ, telle que nous la voyons aujourd’hui[4]. Après les travaux de Stamina à l’église du Carmine, la commune de Florence lui fit peindre, sur le palais des Guelfes, un saint Denis, évêque, entre deux anges, et, au-dessous, une figure de la ville de Pise[5]. Cet ouvrage lui fut commandé l’année que Gabriel Maria[6], seigneur de Pise, vendit cette cité, aux Florentins[7], pour deux cent mille écus, après que Giovanni Gambacorta l’eut assiégée inutilement treize mois et se fut ensuite accordé pour ce prix.

Gherardo en était venu à un haut point de réputation dans sa patrie et au dehors, quand la mort envieuse, éternelle ennemie des grandes actions, l’arrêta dans son essor, et détruisit toutes les espérances qu’il avait fait concevoir. Il mourut inopinément[8], à l’âge de 49 ans[9],

  1. En 1378.
  2. Il ne reste plus rien de ses peintures en Espagne, sauf peut-être une Adoration des Mages, à l’Escurial.
  3. Cette peinture n’existe plus.
  4. Ibid.
  5. Il en reste quelques fragments.
  6. Visconti.
  7. Le 9 octobre 1406, jour de Saint-Denis.
  8. En 1408.
  9. Lire plutôt 54 ans.