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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/332

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musique[1]; l’un d’eux, jouant du luth, prête attentivement l’oreille au son de son instrument. La Vierge est entourée par saint Pierre, saint Jean-Baptiste, saint Julien et saint Nicolas, toutes figures pleines de vie et de vérité. Sur la prédelle[2], on voit de petits sujets tirés de la vie de ces saints et au milieu l’Adoration des Mages, dans laquelle quelques chevaux, peints d’après nature, sont si beaux qu’on ne saurait désirer mieux. Les hommes de la suite des trois rois sont vêtus de costumes variés, en usage à cette époque. Au-dessus du tableau, en guise d’amortissement, il y a plusieurs saints dans des panneaux et entourant un Christ en croix. On croit que la figure d’un saint, en habit d’évêque[3], qui est peinte à fresque dans cette église, à côté de la porte qui donne dans le couvent, est de la main de Masaccio ; mais je crois fermement qu’elle est due à Fra Filippo, son élève.

De retour à Florence, il peignit un homme et une femme nus, de grandeur naturelle, qui appartiennent aujourd’hui à Palla Ruccellai[4]. Ensuite, ne se plaisant pas à Florence et poussé par l’amour de l’art, il résolut d’aller à Rome où il espérait faire des études qui le mettraient à même de surpasser tous ses rivaux. Il y acquit une grande renommée et peignit à fresque, pour le cardinal de San Clemente[5], une chapelle dans l’église du même nom, où il représenta le Christ en croix entre deux larrons, et l’histoire de sainte Catherine martyre. Plusieurs tableaux en détrempe, qu’il fit à la même époque, se sont égarés ou ont été détruits, au milieu des bouleversements de Rome. Il en existe cependant un, à Sainte-Marie-Majeure, dans une petite chapelle voisine de la sacristie ; on y voit quatre saints, si naturels qu’ils paraissent en relief, et entre eux sainte Marie della Neve[6]. On y remarque également les portraits du pape Martin traçant, avec une pioche, les fondations de l’église, et de l’empereur Sigismond. Un jour, Michel-Ange donna, en ma présence, les plus grands éloges à ces figures qui, disait-il, devaient être vivantes, du temps de Masaccio.

Pisanello et Gentile da Fabriano, chargés, par le pape Martin, de décorer l’église de Santo Ianni, avaient confié une partie de ce travail

  1. Ibid.
  2. Actuellement au musée de Berlin.
  3. N’existe plus.
  4. Tableau perdu.
  5. Cardinal Branda da Castiglione. Ces fresques existent encore ; on les attribue aussi à Masolino qui fit des fresques de Castiglione d’Olona, pour le même cardinal Branda.
  6. Actuellement au musée de Naples, dans deux petits cadres.