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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/57

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plinthe sur laquelle pose la colonne doit être haute de deux quarts. Enfin ses corniches seront d’après la fantaisie de l’exécutant.

Les Anciens se servaient, pour décorer les portes, les tombeaux, ou pour remplacer des colonnes d’ornement, de termes de diverses sortes. Certaines figures ont une corbeille sur la tête, en guise de chapiteau ; d’autres ont un demi-corps qui se termine à la base par une pyramide ou un tronc d’arbre. On faisait de cette manière des nymphes, des satyres, des enfants, d’autres monstres ou fantaisies qui étaient utiles. Ce qui passait par la tête des artistes, ils le mettaient à exécution.

Voici un autre genre de travaux, qu’on appelle tudesques [gothiques], et qui diffèrent beaucoup des anciens et des modernes, en ornements et en proportions. Les grands maîtres ne s’en servent plus et les évitent au contraire comme monstrueux, barbares et ne répondant plus à aucun ordre. On pourrait plutôt les appeler confusion et désordre. Ceux qui ont employé ce style dans les œuvres qui sont si nombreuses qu’elles ont infecté toute la terre, ornaient les portes de colonnes grêles et enroulées en ceps de vigne, ne pouvant supporter aucun poids, si faible qu’il fût. Et de même pour toutes les faces et les autres ornements, ils faisaient une infinité ridicule de tabernacles superposés, avec tant de pyramides, de pointes et de feuillages, qu’il paraît impossible qu’ils pussent tenir. L’édifice semble plutôt un château de cartes qu’une construction en pierre et en marbre. Dans ces œuvres, on faisait tant de ressauts, de brisures, de corbeaux, de feuillages, que les œuvres étaient toutes disproportionnées, et, souvent à force de mettre une chose sur l’autre, la construction prenait tant de hauteur que le sommet d’une porte atteignait le toit. Ce style a été trouvé par les Goths, qui ruinèrent les édifices antiques, et firent en sorte par les guerres qu’il n’y eut plus d’architectes. Ils employaient une nouvelle méthode en construisant leurs voûtes en quart point, et remplirent toute l’Italie de ces bâtisses de malheur, dont on a actuellement abandonné le style pour ne plus le reprendre. Que Dieu préserve tout pays d’avoir l’idée, et d’élever de pareilles constructions ! Elles s’éloignent tellement de la beauté de nos constructions, qu’elles ne méritent pas qu’on s’y arrête davantage. Aussi passons aux voûtes.


Chapitre IV. — De la manière de faire les voûtes de mortier ; de les sculpter. À quel moment il faut les décintrer. Comment on fait la pâte de stuc.

Quand les murs sont parvenus au point où commencent les voûtes et qu’il s’agit d’élever celles-ci soit en briques, soit en tuf, soit en spongite, il faut, sur l’assemblage des sablières, construire un cintre