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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/102

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yeux ; pour reproduire les draperies, les armes et autres choses semblables, il fit faire un mannequin de grandeur naturelle, dont les jointures étaient flexibles et qu’il recouvrait d’étoffes. Il pouvait ainsi conserver ses plis jusqu’à ce qu’il eût amené son œuvre à toute sa perfection ; ce mannequin, tout gâté et vermoulu qu’il est, se voit dans notre atelier, en souvenir de ce grand peintre[1].

À Arezzo, dans l’abbaye des moines noirs, il fit en clair-obscur la tête d’un Christ qui est une œuvre admirable, ainsi que le tableau de la Compagnia de’ Contemplani, qui est actuellement chez Messer Alessandro, fils d’Ottaviano de’ Medici[2].

Dans la chapelle du noviciat de San Marco, il y a de sa main un tableau de la Purification[3], d’une couleur et d’un dessin charmants. Tandis que, pour son agrément, il demeurait à Santa Maria Maddalena, dans la maison de campagne des frères, il fit un Christ et une Madeleine[4] et quelques ouvrages à fresque pour le couvent. Il exécuta, pareillement à fresque, dans la salle des étrangers, à San Marco, un arc dans lequel il représenta le Sauveur, accompagné de Cléophas et de Luc[5]. Il commença à San Gallo un tableau que termina Giuliano Bugiardini, et qui est aujourd’hui sur le maître-autel de San Jacopo tra Fossi[6]. Pareillement, un tableau du Rapt de Dinah[7], qui est chez Messer Cristofano Rinieri, fut mis en couleur par Giuliano ; on y voit des édifices et des inventions très estimés.

Piero Soderini lui avait donné à faire le tableau de la salle du Conseil, qu’il dessina en clair-obscur, de manière à se faire grand honneur[8]. Il représente tous les protecteurs de la ville et les saints, dont les jours de fête correspondent à ceux des victoires remportées par Florence ; on y voit le propre portrait du peintre, fait à l’aide d’un miroir[9]. Il l’avait commencé et dessiné en entier quand il lui arriva, à force de travailler sous une fenêtre ouverte, d’être frappé d’une paralysie du côté, au point de ne pouvoir plus se mouvoir. Les médecins lui ordonnèrent d’aller prendre les eaux à San Filippo, où il demeura longtemps mais sa santé s’y améliora peu. Il était très avide de fruits, quoiqu’ils

  1. Conservé à l’Académie des Beaux-Arts.
  2. Ces deux peintures ont disparu.
  3. Au Musée de Vienne, 1516.
  4. En place, fresque de 1517.
  5. Existe encore.
  6. C’est une Pietà, actuellement au palais Pitti.
  7. Au Musée de Vienne, peint par Bugiardini.
  8. Commandé le 26 novembre 1510.
  9. Actuellement aux Offices ; tableau resté inachevé en 1517.