Aller au contenu

Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Vecchia, mais la mort de Giuliano Gondi empêcha de continuer. On y voit, entre autre choses, une cheminée d’une admirable composition[1], et ornée de riches sculptures, si belle qu’on n’en avait pas encore vu de semblable. Giuliano fit de même, pour un Vénitien, hors de la Porta a Pinti in Camerata, un palais et plusieurs maisons, pour des particuliers, dont il n’y a pas lieu de faire mention. Lorsque Laurent, dans un but d’utilité publique, et pour laisser de grands souvenirs, voulut fortifier le Poggio Imperiale[2], sur la route de Rome, et en faire une ville, il ne voulut pas se passer des conseils et des dessins de Giuliano qui commença cette bâtisse fameuse, telle que nous la voyons actuellement. Ces ouvrages lui acquirent une si grande renommée que le duc de Milan lui demanda le modèle d’un palais ; Laurent l’envoya à Milan, où il ne fut pas moins honoré par le duc quii ne l’avait été jadis par le roi de Naples. Le modèle qu’il présenta à ce prince, de la part de Laurent, lui plut tellement qu’il fit jeter de suite les fondations de cet édifice. Dans la mêmeville. Giuliano rencontra Léonard de Vinci qui travaillait pour le duc, et Léonard, lui parlant de la fonte de son cheval, reçut de lui d’utiles conseils. Cette œuvre fut ensuite mise en pièces, à l’entrée des Français[3], et ainsi ni le palais, ni le cheval ne furent terminés.

De retour à Florence, Giuliano trouva que son frère Antonio, qui l’aidait dans la confection de ses modèles, était devenu si habile, que personne ne sculptait mieux que lui, surtout les grands crucifix en bois, on peut en juger par celui qui est sur le maître-autel de la Nunziata[4] et ceux que possèdent les moines de San Gallo, à San Jacopo tra Fossi[5], et la confrérie dello Scalzo. Mais Giuliano détermina son frère à abandonner cet art, et l’associa à ses travaux d’architecture, ayant à élever de nombreuses constructions publiques et privées.

Sur ces entrefaites, comme il arrive toujours, la fortune, ennemie du génie, brisa les espérances des gens de mérite, en enlevant Laurent de Médicis[6] ; cette mort fut un malheur, non seulement pour les artistes et la ville de Florence, mais encore pour toute l’Italie. Giuliano en resta inconsolable, ainsi que tous les hommes d’un esprit élevé,

  1. Elle existe toujours dans ledit palais.
  2. Complètement dénaturé par des travaux modernes.
  3. Ce fait n’a jamais été prouvé.
  4. Actuellement à côté de la chapelle de la Vierge ; œuvres des deux frères, en 1482.
  5. Actuellement dans la chapelle des peintres, cloître de l’Annuziata. Celui dello Scalzo a disparu ; œuvre d’Antonio, en 1514.
  6. Mort le 8 avril 1492, dans sa villa de Careggi.