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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/170

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l’élève apprenait avec ardeur et rapidité tout ce qu’on lui montrait, en sorte que Lorenzo ne tarda pas à devenir excellent dessinateur, orfèvre élégant et expérimenté, et à surpasser tous les jeunes gens de son temps, au grand honneur de Credi. Aussi n’appela-t-on plus son élève Lorenzo Sciarpelloni, mais bien Lorenzo di Credi. L’ardeur de Lorenzo augmentant avec les années, il se plaça près d’Andrea del Verrocchio, qui par fantaisie, s’était mis à peindre ; il y eut, pour compagnons et amis en même temps que pour rivaux, Pietro Perugino et le Vinci et s’attacha avec ardeur à la peinture. Comme la manière de Léonard lui plaisait outre mesure, il arriva à l’imiter si bien que personne plus que lui n’approcha du fini précieux de ce maître, comme le prouvent une foule de dessins au crayon, à la plume et à l’aquarelle que l’on conserve de lui[1], entre autres quelques portraits d’après des modèles, en terre, sur toile de lin enduite, imités avec tant de soin et terminés avec une telle patience que l’on peut à peine le croire et que l’on en ferait autant difficilement. Étant donc très aimé de son maître pour ces raisons, quand Andrea alla à Venise pour couler en bronze la statue équestre de Bartolommeo de Bergame, celui-ci lui laissa la gestion de ses affaires, et confia à sa garde ses dessins, ses bas-reliefs, ses statues et en un mot, tout le matériel de son atelier[2]. De son côté, Lorenzo avait une telle affection pour Andrea, son maître, que non seulement il s’employa à Florence avec un zèle incroyable à toutes ses affaires mais encore il se rendit plus d’une fois à Venise pour le voir et lui rendre compte de sa bonne administration, le tout à la grande satisfaction d’Andrea qui aurait institué Lorenzo son héritier, si celui-ci y eût consenti. L’élève d’ailleurs se montra reconnaissant de ces bons sentiments ; car, à la mort de son maître, il alla à Venise, ramena son corps à Florence et remit aux héritiers ce qui appartenait à Andrea, à l’exception des dessins, des peintures, des sculptures et des autres objets d’art.

Ses premières peintures furent un tableau rond représentant la Vierge, qui fut envoyé au roi d’Espagne et dont le dessin est tiré d’un tableau d’Andrea, son maître, puis un tableau infiniment supérieur, reproduit d’un tableau de Léonard de Vinci et envoyé également en Espagne, mais si semblable à celui de Léonard, que l’on ne pouvait

  1. Au Musée des Offices.
  2. Dans son testament, Verrocchio le charge de terminer la statue du Colleone, quia est sufficiens ad id perficiendum.