Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/196

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nable, dans l’espoir qu’il lui ramènerait la faveur de François 1er. au service duquel il désirait retourner. Il fit encore un tableau pour Lorenzo Jacopo, d’une grandeur bien supérieure à ses dimensions habituelles, et qui renferme une Vierge assise, tenant son fils dans ses bras, avec deux autres figures qui l’accompagnent et sont assises sur des escaliers : ce tableau n’est pas inférieur comme dessin et comme coloris à ses autres œuvres. Il peignit pareillement un tableau de la Vierge pour Giovanni d’Agostino Dini, et le portrait d’après l’original de Cosimo Lapi, qui est si beau qu’il paraît vivant[1].

L’an 1523, la peste éclata à Florence et dans quelques endroits des environs ; grâce à l’entremise d’Antonio Brancacci, pour fuir la peste et pour trouver quelque travail, Andrea alla à Mugello, pour faire un tableau, chez les religieuses camaldules de San Piero a Luco. Il y emmena sa femme, sa belle-fille, sa belle-sœur et un de ses élèves. Étant tranquille dans ce lieu, il commença le tableau, et comme les vénérables religieuses l’accablaient chaque jour davantage de prévenances et de soins, lui, sa femme et sa suite, il apporta à cette œuvre toute l’application imaginable. Ce tableau[2] représente le Christ mort, pleuré par la Vierge, saint Jean l’évangéliste et la Madeleine ; ces figures sont si vivantes qu’elles paraissent avoir le souffle et l’esprit. On reconnaît dans saint Jean la douce affection qui animait cet Apôtre, de même que l’amour dans la Madeleine éplorée et une extrême douleur dans le visage et l’attitude de la Vierge, qui émeut profondément saint Pierre et saint Paul contemplant le corps du Sauveur du monde étendu sur les genoux de sa mère. On peut dire avec vérité que ce tableau a valu plus de célébrité au monastère de San Piero que toutes les constructions qu’on y a élevées, si magnifiques et si extraordinaires qu’elles soient.

Ce tableau terminé, comme le danger de la peste n’était pas encore passé, Andrea resta quelques semaines de plus dans ce couvent, où il était bien vu et bien traité. Pour ne pas demeurer dans l’inaction, il employa ce temps à peindre non seulement la Visitation qui est dans l’église, en guise de couronnement d’une vieille peinture, au-dessus de la crèche, mais encore, sur une petite toile, une très belle tête du Christ[3], à peu de chose semblable à celle qui est sur l’autel de la Nunziata, mais non terminée. Ayant ainsi passé sans danger le

  1. Ces tableaux sont perdus.
  2. Terminé en 1524 ; au palais Pitti. La prédelle est toujours dans l’église de Luco.
  3. Tableau perdu.