Aller au contenu

Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui ne sauraient être plus beaux. Parmi les nombreux enfants que Durer a gravés pour décorer des armoiries et des devises, on remarque ceux qui soutiennent un écu renfermant une figure de la Mort, coiffée d’un casque surmonté d’un coq dont les plumes sont traitées avec une telle délicatesse qu’il est impossible d’obtenir une taille plus fine avec le burin. Dernièrement, Dürer a publié[1] un saint Jérôme vêtu en cardinal et occupé à écrire, avec un lion qui dort à ses pieds ; le soleil traverse les vitres des fenêtres et envoie des rayons si vifs dans la chambre où le saint écrit, que c’est une merveille à regarder. On y voit, en outre, des livres, des horloges, des manuscrits et une foule d’autres accessoires supérieurement rendus. Peu après, l’an 1523, il fit un petit Christ avec les Apôtres[2] ; c’est une de ses dernières productions. On lui doit aussi plusieurs portraits, tels que ceux d’Erasme, de Rotterdam, du cardinal Albert de Brandebourg, électeur de l’Empire, et le sien propre[3]. Tout en s’occupant beaucoup de gravure, il n’abandonna pas la peinture ; il peignit au contraire continuellement des panneaux, des toiles et d’autre œuvres toutes précieuses. De plus, il laissa de nombreux écrits relatifs à la gravure, à la peinture, à la perspective et à l’architecture.

Pour revenir à la gravure, les œuvres de Dürer furent cause que Lucas de Hollande s’efforça de suivre ses traces. Après les estampes mentionnées plus haut, il grava sur cuivre quatre sujets tirés de l’histoire de Joseph, les quatre Évangélistes, les trois anges qui apparurent à Abraham dans la vallée de Mambré, Suzanne au bain, David en prière, le triomphe de Mardochée, Loth enivré par ses filles, la Création d’Adam et d’Ève, Dieu défendant à nos premiers parents de manger le fruit d’un arbre qu’il leur montre, et Caïn tuant son frère Abel ; toutes ces planches furent publiées l’an 1529[4]. Mais les œuvres qui, plus que toute autre, augmentèrent sa réputation, furent un Crucifiement de Jésus et un Ecce Homo[5]. Ces deux planches, de grandes dimensions et renfermant beaucoup de figures, sont regardées comme très précieuses, ainsi qu’une Conversion de saint Paul sur le chemin de Damas. Ces divers morceaux suffisent pour montrer que Lucas peut être compté parmi les maîtres qui ont excellé dans le travail du burin. Les compositions de ses sujets sont plus conformes aux règles de l’art

  1. En 1514.
  2. Cette série est inconnue. Il y a cinq gravures représentant des Apôtres ; c’est peut-être celles dont Vasari veut parler.
  3. Gravure sur bois.
  4. Cette date n’est pas exacte. La Suzanne est de 1508, le Mardochée de 1515, l’Histoire de Joseph, de 1512, Loth et ses filles, de 1530.
  5. Daté 1510 ; grande planche contenant plus décent personnages.