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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/272

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paysage plein d’ombre très estimé, l’invention et le carton en sont dus à Michel-Ange, et ce tableau fut universellement regardé comme vraiment très beau par tous ceux qui le virent.

Pier Francesco Borgherini, marchand florentin, ayant acquis une chapelle à main droite en entrant dans San Piero in Montorio, Michel-Ange en fit allouer les peintures à Sebastiano, parce que Borgherini pensa avec raison que Michel-Ange ferait le dessin de toute l’œuvre. Comme Sebastiano croyait avoir trouvé la manière de peindre à l’huile, sur le mur, il couvrit le crépissage de cette chapelle d’un enduit qui lui parut devoir être propre à ce genre de travail, et il peignit à l’huile, sur le mur, un Christ battu à la colonne[1]. Je ne passerai pas sous silence que, selon le dire de quelques-uns, Michel-Ange non seulement donna un petit dessin de cette composition, mais encore traça lui-même sur la muraille les contours de la figure du Christ ; il y a une énorme différence entre la bonté de cette figure et celle des autres. Au-dessus de cette peinture, Sebastiano exécuta à fresque deux Prophètes, et, sur la voûte, la Transfiguration, puis saint Pierre et saint François, qui encadrent la peinture d’au-dessous. Il passa six années à terminer ces travaux ; quand il les découvrit, les mauvaises langues durent se taire, et bien peu purent le mordre.

Lorsque Raphaël fit, pour le cardinal Jules de Médicis, le tableau qui devait être envoyé en France, et qui, après sa mort, fut placé à l’autel principal de San Piero a Montorio, et qui représente la Transfiguration du Christ, Sebastiano fit, sur un tableau de la même grandeur, et, pour ainsi dire, en concurrence de Raphaël, une Résurrection de Lazare après quatre jours, qui fut composée et peinte avec un soin extrême, sous la direction et avec le dessin, en quelques parties de Michel-Ange. Ces deux tableaux terminés furent exposés et mis en parallèle, dans la salle du Consistoire, et l’un et l’autre reçurent les plus grands éloges ; bien que l’œuvre de Raphaël n’eut pas son égale, pour sa grâce extrême et sa beauté, néanmoins les efforts de Sebastiano furent universellement loués de tous. Le Lazare[2] fut envoyé à Narbonne par le cardinal de Médicis, qui en était évêque, et la Transfiguration resta dans la Chancellerie, jusqu’au moment où elle fut transportée à San Piero a Montorio, avec le cadre dû à Giovan Barile.

  1. Existe encore, en mauvais état ; terminé en 1525.
  2. Signé ; SEBASTIANVS VENETVS FACIEBAT. Terminé en 1519 ; actuellement à la Galerie Nationale de Londres.