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un tableau renfermant les portraits du pape Clément et de Baccio ; Messer Ottaviano de’Medici lui en avait demandé un autre renfermant également les portraits du pape et de l’archevêque de Capone[1]. Michel-Ange ayant donc fait demander à Fra Sebastiano de lui envoyer de sa main un portrait du pape, à l’huile, le peintre en fit un qui fut parfaitement réussi, et l’envoya à Florence ; ce tableau fut ensuite donné par Michel-Ange à Messer Ottaviano.

De tous les portraits que fit Sebastiano, celui de Clément VII est le plus beau et le plus ressemblant ; il peignit aussi, d’après nature, Paul Farnese, aussitôt après qu’il eût été nommé pape, et commença le portrait du duc de Castro, son fils[2], qu’il laissa inachevé comme tant d’autres choses.

Finalement, il se brouilla avec Michel-Ange. Celui-ci ayant à peindre le Jugement dernier dans la chapelle Sixtine, Sebastiano avait persuadé le pape de le faire faire à l’huile, tandis que Michel-Ange ne voulait pas le peindre autrement qu’à la fresque. Mais, sans dire ni oui ni non, et laissant Sebastiano préparer l’enduit, il resta sans y travailler pendant plusieurs mois, et déclara finalement que l’art de la peinture à l’huile n’était qu’un art de femme, bon seulement pour des paresseux et des fainéants tels que Sebastiano. Puis il fit jeter à terre l’enduit préparé par celui-ci et recrépir le mur à son gré, commençant ensuite la peinture, sans toutefois oublier l’injure qu’il croyait avoir reçue de Sebastiano, auquel il tint rigueur presque jusqu’à la mort de ce dernier.

Sebastiano en était arrivé à ne plus vouloir travailler, ni faire quoi que ce fût, en dehors de son office du Plomb. Il continua de faire bonne chère, jusqu’au moment où il fut attaqué d’une fièvre violente, à l’âge de 62 ans. Comme il était rubicond de figure, et d’une nature sanguine, cette fièvre l’emporta en peu de jours. Par son testament, il ordonna qu’on l’enterrât sans grand accompagnement de prêtres et de cierges, et que l’on distribuât aux pauvres, pour l’amour de Dieu, l’argent qu’il aurait fallu y dépenser, ce qui fut fait. On l’ensevelit dans l’église del Popolo, au mois de juin de l’an 1547[3]. L’art ne perdit pas beaucoup à sa mort, car, dès qu’il fût nommé au Plomb, on put le compter parmi ceux qui ne produisaient plus. Il faut ajouter

  1. Nicolas Schomberg. Deux portraits de Clément VII sont aux Musées de Naples et de Parme.
  2. Ces deux portraits sont perdus.
  3. Mort le 21 juin 1547. Enterré à Sainte-Marie-Majeure.