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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/31

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fresque deux belles figures dans sa villa[1]. Il fit encore à fresque une peinture très gracieuse[2] dans la maison de Messer leronimo Bolognino, avec quantité de figures variées et très belles. Toutes ces œuvres lui avaient valu une telle vénération dans cette ville qu’on le regardait comme un dieu. Et ce qui porta sa réputation aux nues, ce fut le travail que lui demanda le duc d’Urbin, à savoir : une paire de caparaçons pour chevaux[3], sur lesquels il représenta une grande forêt en feu, de laquelle sortait une quantité considérable d’animaux terrestres et ailés, ainsi que quelques figures ; œuvre terrible, capable de donner l’épouvante et pour laquelle le duc récompensa richement le Francia, outre qu’il lui eut toujours de grandes obligations, à cause des éloges qu’il en reçut. Le duc Guido Baldo, pareillement, a dans sa garderobe un tableau de la main du même, représentant une Lucrèce romaine qui est très estimée[4].

Dans l’église San Vitale e Agricola, à l’autel de la Madone, il peignit un tableau dans lequel on remarque deux anges jouant du luth, très beaux[5]. Je ne ferai pas mention des tableaux qui sont répandus par Bologne, dans les maisons des gentilshommes, et encore moins des portraits infinis qu’il fit d’après l’original ; cela m’entraînerait trop loin.

Pendant qu’il était dans une telle gloire et qu’il jouissait en paix du fruit de ses fatigues, Raphaël d’Urbin était à Rome et, toute la journée, une foule d’étrangers étaient autour de lui, entre autres des gentilshommes bolonais venu pour voir ses œuvres. Comme il arrive le plus souvent qu’on vante volontiers les beaux génies de son pays, ces Bolonais parlèrent à Raphaël, avec force louanges, des peintures, de la vie et du talent de Francia, en sorte qu’ils provoquèrent entre eux une vive amitié et que les deux peintres s’écrivirent[6]. Le Francia, ayant entendu tant vanter les divines peintures de Raphaël, aurait bien aimé les voir, mais son âge avancé et ses aises le retenaient dans sa ville de Bologne. Or il arriva que Raphaël fit à Rome, pour le cardinal de’ Pucci Santi Quattro un tableau de sainte Cécile[7], destiné à être envoyé à Bologne pour être placé dans la chapelle de San Giovanni in

  1. N’existent plus.
  2. Ibid.
  3. Ibid.
  4. Ibid.
  5. En place.
  6. Il reste une lettre de Raphaël, du 5 septembre 1508, dans laquelle il demande à Francia de lui envoyer le dessin de la Judith du palais Bentivogli.
  7. Actuellement à la Pinacothèque de Bologne.