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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/328

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gentilhomme et à prendre le temps comme il venait. Lors de la venue du pape Léon X à Florence[1], il fit, avec l’aide de ses élèves, presque tout l’apparat du palais Médicis ; ce fut lui qui exécuta les ornements de la salle du pape et de divers appartements ; quant à la chapelle, il la donna à faire au Pontormo. De même, pour les noces du duc Julien et du duc Laurent, il fit tout l’apparat, ainsi que des décors de théâtre. Comme il était très aimé de ces seigneurs, à cause de son talent, il eut plusieurs emplois, grâce à eux, et fut nommé membre du collège, étant honorable citoyen. Il ne dédaignait pas de peindre des draperies, des bannières et autres choses semblables.

Parmi tous ses élèves, un ancien disciple de Lorenzo di Credi, appelé Michele[2], lui fut particulièrement cher, à cause de sa bonne nature et de la manière fière et sans effort avec laquelle il peignait. Après lui avoir donné le tiers du gain, il se l’associa, de manière à faire ensemble leurs œuvres, en partageant le prix. Michele eut toujours pour Ridolfo une affection vraiment filiale, de sorte qu’on ne l’appelle que Michele di Ridolfo. Ils peignirent ensemble une quantité de tableaux à Florence, à Prato et dans les environs. Parmi les nombreux portraits qui sortirent de l’atelier de Ridolfo, je ne citerai que celui du duc Cosme de Médicis, quand il était jeune, qui est actuellement dans la garde-robe de Son Excellence[3].

Il était très expéditif dans certaines œuvres et en particulier dans les apparats de fêtes ; pour l’entrée de l’empereur Charles-Quint à Florence il fit, en dix jours, un arc de triomphe au Canto alla Cuculia. Il en éleva un autre également en très peu de temps, près de la Porta al Prato, pour célébrer l’arrivée de l’illustrissime duchesse Leonora. Dans le palais du duc Cosme, il orna de grotesques le plafond de la chambre verte dont, en outre, il couvrit les parois de paysages qui plurent infiniment à Son Excellence. Il eut une vieillesse heureuse, ayant marié ses filles et voyant ses fils à la tête de bonnes maisons de commerce en France et à Ferrare. Il est vrai qu’il fut attaqué de la goutte, au point qu’il était forcé de rester chez lui, ou de se faire porter sur un siège ; mais il supporta avec patience cette infirmité et quelques mésaventures qui arrivèrent à ses fils. Quoique vieux, il portait le même amour qu’autrefois aux choses de l’art, voulant en entendre parler, et allant quelquefois voir les peintures et les construc-

  1. En 1515.
  2. Michele Tosini, 1503-1577.
  3. Ce portrait est perdu.