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Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/330

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apprit de lui à peindre ces objets aussi bien que ce maître, mais avec une manière souple et moelleuse, qui le fit réussir parfaitement dans quelques œuvres, comme on le dira. Il apprit en outre à faire des paysages remplis de ruines et de fragments antiques et à peindre des verdures sur toile, dans la manière qui a été usitée après lui, non seulement par les Flamands, mais encore par tous les peintres italiens.

Pendant l’exécution du tableau de sainte Cécile, qui est à Bologne, Raphaël, qui aimait beaucoup le talent de Giovanni, lui fit faire l’orgue que tient la sainte et que l’on croirait en relief, ainsi que tous les instruments de musique qui sont à terre ; la manière de peindre de Giovanni fut si semblable à celle de Raphaël, que le tableau entier paraît dû à une seule main. À peu de temps de là, en pratiquant des fouilles, pour chercher des statues, dans les ruines du palais de Titus, derrière San Piero in Vincola, on trouva quelques salles souterraines couvertes de grotesques, de figurines et d’ornements en stuc[1]. Giovanni étant allé avec Raphaël, qui y fut conduit pour les voir, tous deux restèrent stupéfaits de la fraîcheur, de la beauté et de la bonté de ces compositions, ne pouvant comprendre qu’elles se fussent conservées à travers tant de siècles : rien de plus simple cependant, puisqu’elles avaient été à l’abri des intempéries de l’air, auxquelles rien ne saurait résister, par suite des variations des saisons. Ces grotesques (ainsi appelés du nom de grottes, où on les découvrit), si remarquablement dessinés avec leurs caprices variés et les délicats motifs des stucs jetés sur les fonds diversement coloriés, séduisirent Giovanni de telle sorte qu’il se mit à les étudier et à les reproduire, non pas une seule fois, mais souvent avec une ardeur incroyable ; bientôt il ne lui manqua plus que de connaître le procédé employé par les anciens pour faire le stuc, sur lequel ces grotesques avaient été exécutés. Avant lui, bien d’autres s’étaient torturés l’esprit sans avoir trouvé autre chose qu’un enduit cuit au feu et composé de plâtre, de chaux, de poix-résine, de cire et de brique pilée, qu’ils doraient ensuite.

On établissait à ce moment, comme nous l’avons dit dans la vie de Bramante, les ornements et les caissons des quatre arcs et de la tribune postérieure de Saint-Pierre de Rome, en coulant dans des moules en bois un stuc fait avec de la chaux et de la pouzzolane, qui donnait tous les détails de sculpture. Giovanni essaya de cette méthode pour obtenir des figures en bas-relief ; elles réussissaient en tout point, sauf que la dernière touche n’avait ni cette finesse ni cette blancheur qui dis-

  1. Cette décoration n’existe pour ainsi dire plus.