Page:Les voyages au théâtre par A. D'Ennery et Jules Verne.djvu/413

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STROGOFF.

Oui, c’est la voix d’un traître !… C’est la voix d’Ivan Ogareff.

IVAN.

Ogareff, auquel tu n’échapperas pas, cette fois !… Ogareff, que n’arrêtera pas ce vain commandement du Koran qui protège les aveugles ! Ah ! tu te réjouis, n’est-ce pas, d’avoir pu arriver à temps pour accomplir la mission et sauver à la fois Irkoutsk et le Grand-Duc ?

STROGOFF.

Peut-être !

IVAN.

Tu espères encore !… mais sache donc que nous sommes seuls ici ! Avant que nul ne vienne, mon poignard, fouillant dans ta poitrine, t’en arrachera le cœur !

STROGOFF, froidement.

Essaye.

IVAN.

Tu oses me braver… quand je te tiens seul et sans défense !… quand je n’ai qu’à choisir la place pour frapper ! Ah ! comme je vais bien te tuer !

STROGOFF.

J’attends ! (Ivan s’approche de Strogoff, le poignard levé, mais le coup est détourné, et Strogoff lui arrache son arme.)

STROGOFF.

Eh bien, j’attends toujours.

IVAN.

Est-ce un rève !… Un miracle n’a pu se faire pour ce misérable !…

STROGOFF, s’avançant vers lui et lui prenant le bras.

Alors, pourquoi trembles-tu ?

IVAN, voulant se dégager.

Non !… C’est impossible !…

STROGOFF.

Ivan Ogareff, ton heure suprême est arrivée !… Regarde de tous tes yeux !… regarde !

IVAN.

Miséricorde ! Il voit ! il voit ! il voit !

STROGOFF.

Oui, je vois sur ton visage de traître la pâleur et l’épouvante ! Je vois la trace du knout, le stigmate de honte dont j’ai marqué ton front ! Je