dame. L’excellent sujet ! il a de l’argent, il est prodigue et crédule ; c’est un homme fait pour les coquettes.
J’en fais assez ce que je veux, comme tu vois.
Oui ; mais, par malheur, je vois arriver ici des gens qui vengent bien M. Turcaret
Scène VIII.
Je viens, madame, vous témoigner ma reconnoissance. Sans vous j’aurois violé la foi des joueurs : ma parole perdoit tout son crédit, et je tombois dans le mépris des honnêtes gens.
Je suis bien aise, chevalier, de vous avoir fait ce plaisir
Ah ! qu’il est doux de voir sauver son honneur par l’objet même de son amour !
Qu’il est tendre et passionné. Le moyen de lui refuser quelque chose !
Bonjour, Marine. {A la baronne, avec ironie.) Madame, j’ai aussi quelques grâces à lui rendre. Frontin m’a dit qu’elle s’est intéressée à ma douleur.
Eh ! oui, merci de ma vie, je m’y suis intéressée ; elle nous coûte assez pour cela.
Taisez-vous, Marine. Vous avez des vivacités ! comptes, qui ne me plaisent pas.
Eh ! madame, laissez-la parler ; j’aime les gens francs et sincères.
Et moi, je hais ceux qui ne le sont pas.
Elle est toute spirituelle dans ses mauvaises humeurs ; elle a des reparties brillantes qui m’enlèvent. .. (A Marine, ironiquement.) Marine, au moins, j’ai pour vous ce qui s’appelle une véritable amitié ; et je veux vous en donner des marques…. ( fait semblant de fouiller dans ses poches. À Frontin ironiquement.) Frontin, la première fois que je gagnerai, fais m’en ressouvenir.
C’est de l’argent comptant.
J’ai bien affaire de son argent. Eh ! qu’il ne vienne pas ici piller le nôtre.
Prenez garde à ce que vous dites. Marine.
C’est voler au coin d’un bois.
Vous perdez le respect.
Ne prenez point la chose sérieusement !
Je ne puis me contraindre, madame ; je ne puis voir tranquillement que vous soyez la dupe de monsieur, et que M. Turcaret soit la vôtre.
Marine !…
Eh ! fi, fi, madame, c’est se moquer de recevoir d’une main pour dissiper de l’autre ; la belle conduite ! Nous en aurons toute la honte, et M. le chevalier tout le profit.
Oh ! pour cela, vous êtes trop insolente ; je n’y puis plus tenir.
Ni moi non plus.
Je vous chasserai
Vous n’aurez pas cette peine-là, madame. Je me donne mon congé moi-même ; je ne veux pas que l’on dise dans le monde que je suis infructueusement complice de la ruine d’un financier,
Retirez — vous, impudente, et ne paroissez jamais devant moi que pour me rendre vos comptes.
Je les rendrai à M. Turcaret, madame ; et, s’il est assez sage pour m’en croire, vous compterai aussi tous deux ensemble. (Elle sort)
Scène IX.
Voilà, je l’avoue, une créature impertinente ! Vous avez eu raison de la chasser.
Oui, madame, vous avez eu raison. Comment