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forcent tout le monde à lui rendre justice et à l’admirer, et j’ose dire qu’il est mort digne de moi.... Croyez que tant que j’aurai un cœur il existera pour vous aimer.


CCLVIII.

Au baron de Flachslanden.
1790, 22 avril.
Ce jeudi 22.

Votre lettre, Monsieur le baron, vous entraine nécessairement à une nouvelle importunité de ma part. D’abord, j’ai été enchantée de vos idées, et, sans me vanter, je peux dire que j’ai pensé de même sur le personnage en question. Mais je crois comme vous qu’il est essentiel d’en tirer un parti quelconque et prompt. La difficulté est de savoir par qui lui faire parler. Il serait peut-être bien qu’il pût croire positivement que c’est de ma part, mais jamais assez pourtant pour qu’il puisse me citer. Où trouver un homme assez insignifiant dans ce moment, mais assez fidèle, assez prudent, et surtout assez ferme et adroit, pour parler à un être dont l’existence n’est que fourberie, astuce et menterie ? Il est bien nécessaire aussi

<ref>Il s’agit ici des négociations du Roi et de la Reine avec Mirabeau. Il y avait longtemps que La Marck les poussait d’entrer en relations avec le fougueux tribun. Après de longs pourparlers, ce fut lui qui fut chargé d’être l’intermédiaire. Dès le 10 mai, Mirabeau écrivait une lettre, destinée à être mise sous les yeux des souverains, où il promettait au Roi « loyauté, zèle, activité, énergie et courage. » Le 1er juin, il remettait la première de ses fameuses notes. Voir, sur toutes ces négociations, la Correspondance entre le comte de Mirabeau et le comte de la Marck, publiée par M. de Bacourt.