Page:Lewis - Le Moine, Tome 2, trad Wailly, 1840.djvu/152

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il était persuadé que ce n’était point un motif ordinaire qui pouvait la conduire dans ce lieu lugubre à une pareille heure : le cri qu’il avait entendu lui avait paru un cri de terreur, et il était convaincu que cet événement cachait un mystère. Après plusieurs minutes d’hésitation, il continua de marcher à tâtons le long des murs. Il y avait déjà quelque temps qu’il avançait ainsi lentement, lorsqu’il aperçut une lueur qui brillait à distance : guidé par elle et tirant l’épée, il dirigea ses pas vers l’endroit d’où la lumière paraissait sortir.

Elle venait d’une lampe qui brûlait devant la statue de sainte Claire ; devant se tenaient plusieurs femmes : leurs vêtements blancs flottaient agités par le vent qui grondait sous les voûtes. Curieux de savoir ce qui les avait rassemblées dans ce lieu de tristesse, Lorenzo s’approcha avec circonspection. Les étrangères avaient l’air d’être engagées dans une conversation fort animée ; elles n’entendirent pas Lorenzo, et il avança assez près pour entendre distinctement leurs voix.

« Je vous jure, » continua celle qui parlait quand il arriva, et que les autres écoutaient avec une grande attention, « je vous jure que je les ai vus de mes yeux. J’ai vite descendu l’escalier, ils m’ont poursuivie, et j’ai eu bien de la peine à éviter de tomber dans leurs mains ; sans la lampe, je ne vous aurais jamais trouvées. »

« Et que viennent-ils faire ici ? » dit une autre d’une voix tremblante ; « croyez-vous qu’ils nous cherchent ? »

« Dieu veuille que mes craintes soient fausses, » répliqua la première ; « mais je présume que ce sont des assassins ! s’ils nous découvrent, nous sommes perdues ! quant à moi, mon sort est certain, ma parenté avec l’abbesse sera un crime suffisant pour me condamner ; et